Citationes

« Pour développer de grands et puissants caractères, de grandes injustices sociales sont indispensables. »

— Constantin Léontiev cité par Nicolas Berdiaev, Constantin Leontiev, trad. Hélène Iswolsky, éd. Berg International, coll. « Histoire des idées », 1993 (ISBN 9782900269855), p. 81


« L'idée du bien général ne contient rien de réel. »

— Constantin Léontiev, Écrits essentiels, trad. Danièle Beaune-Gray, éd. L'Âge d'Homme, coll. « Slavica », 2003 (ISBN 9782825117262), p. 


« L'humanité heureuse et uniforme est un fantôme sans beauté et sans charme, mais l'ethnie est, bien entendu, un phénomène parfaitement réel. Qu'est ce qu'une ethnie sans son système d'idées religieuses et étatiques ? »

— Constantin Léontiev, Écrits essentiels, trad. Danièle Beaune-Gray, éd. L'Âge d'Homme, coll. « Slavica », 2003 (ISBN 9782825117262), p. 108


« L'homme privé de la liberté du mal ne saurait être qu'un automate du bien. »

— Constantin Léontiev, Écrits essentiels, trad. Danièle Beaune-Gray, éd. L'Âge d'Homme, coll. « Slavica », 2003 (ISBN 9782825117262), p. 


« La liberté du mal peut être un plus grand bien qu'un bien forcé. »

— Constantin Léontiev, Écrits essentiels, trad. Danièle Beaune-Gray, éd. L'Âge d'Homme, coll. « Slavica », 2003 (ISBN 9782825117262), p. 


« Je présume, à en juger par la marche dévastatrice de l'histoire contemporaine, que c'est justement la raison supérieure qui sera enfin contrainte de prendre parti contre tout ce qui est à l'heure actuelle si répandu, à savoir contre l'égalité et la liberté (en d'autres termes contre le mélange des classes sociales), contre l'instruction généralisée et la démocratisation des connaissances. Vraisemblablement il faudra même prendre parti contre les abus de la machine et contre les diverses inventions techniques qui jouent de façon très dangereuse avec les forces secrètes et terrifiantes de la nature. »

— Constantin Léontiev, L'Européen moyen : idéal et outil de la destruction universelle (1872-1884), trad. Danièle Beaune-Gray, éd. L'Âge d'Homme, coll. « Amers », 1999 (ISBN 9782825112465), p. 29


« Autrefois les gens de conditions différentes, de sphères différentes, de métiers et de professions différents, vivaient pour ainsi dire dans des mondes différents. Aujourd'hui ils vivent presque dans le même monde. Maintenant si l'on se réfère au passé, ils lisent les mêmes livres, entendent les mêmes choses, voient des spectacles semblables, fréquentent les mêmes endroits ; leurs espoirs et leurs peurs se tournent vers les mêmes objets : leurs droits sont identiques, leurs libertés et les moyens de les défendre semblables. Quel que soit l'écart entre leurs situations, ces différences ne sont rien par rapport à ce qu'elles étaient auparavant. Et cette assimilation ne fait que croître. Tous les changements politiques actuels la favorisent car ils tendent tous à élever les basses classes et à humilier les classes supérieures. Toute diffusion de l'instruction la favorise car celle-ci unit les gens par un fonds commun d'impressions et rend accessible à tous le capital commun de connaissances et de sentiments humains. Toute amélioration des moyens de communication contribue à cela car ces derniers mettent en contact des habitants de pays éloignés. Tout accroissement du commerce et de l'industrie favorise cette assimilation en répandant les richesses et en rendant accessibles à tous beaucoup de produits convoités. »

— Constantin Léontiev, L'Européen moyen : idéal et outil de la destruction universelle (1872-1884), trad. Danièle Beaune-Gray, éd. L'Âge d'Homme, coll. « Amers », 1999 (ISBN 9782825112465), p. 55


« Il faut que dorénavant la vie conduise la société sur les chemins d'une mobilité moins grande ; il faut mélange et assimilation se calment graduellement d'eux-mêmes. Il n'y a pas d'autre issue, ni pour l'Occident, ni pour la Russie, ni pour toute l'humanité. »

— Constantin Léontiev, L'Européen moyen : idéal et outil de la destruction universelle (1872-1884), trad. Danièle Beaune-Gray, éd. L'Âge d'Homme, coll. « Amers », 1999 (ISBN 9782825112465), p. 66


« Si nous ne le faisons pas, nous ne sommes placés dans cette position centrale que pour mélanger définitivement tout et tous et écrire le dernier mot sur l'édifice de l'État universel.

Cela signifiera clore l'histoire en ayant fait périr l'humanité par la diffusion de l'égalité et de la liberté universelles ; cela signifiera rendre la vie humaine totalement impossible sur le globe terrestre — car il n'y aura plus alors sur terre de vieilles tribus sauvages ni de vieux mondes culturels endormis. »

— Constantin Léontiev, L'Européen moyen : idéal et outil de la destruction universelle (1872-1884), trad. Danièle Beaune-Gray, éd. L'Âge d'Homme, coll. « Amers », 1999 (ISBN 9782825112465), p. 75


« La liberté, l'égalité, la prospérité (notamment cette prospérité) sont acceptés comme des dogmes de la foi et on nous affirme que cela est parfaitement rationnel et scientifique. Mais qui nous dit que ce sont des vérités ? La science sociale est à peine née que les hommes, méprisant une expérience séculaire et les exemples d'une nature qu'ils révèrent tant aujourd'hui, ne veulent pas admettre qu'il n'existe rien de commun entre le mouvement égalitaro-libéral et l'idée de développement. Je dirais même plus : le processus égalitaro-libéral est l'antithèse du processus de développement. »

— Constantin Léontiev, Écrits essentiels, trad. Danièle Beaune-Gray, éd. L'Âge d'Homme, coll. « Slavica », 2003 (ISBN 9782825117262), p. 139


« La marche tranquille et graduelle du progrès égalitaire doit avoir vraisemblablement sur le futur immédiat des nations une action différente de celle des révolutions violentes qui se font au nom de ce même processus égalitaire. Mais je prétends que, dans un avenir plus éloigné, ces actions seront similaires. Tout d'abord un mélange paisible, l'effondrement de la discipline et le déchaînement par la suite. L'uniformité des droits et une plus grand similitude qu'auparavant de l'éducation et de la situation sociale ne détruisent pas les antagonismes d'intérêts, mais les renforcent sans doute, car les prétentions et les exigences sont semblables. On remarque également que, partout, vers la fin de l'organisation étatique, l'inégalité économique devient plus grande à mesure que se renforce l'égalité politique et civique. »

— Constantin Léontiev, Écrits essentiels, trad. Danièle Beaune-Gray, éd. L'Âge d'Homme, coll. « Slavica », 2003 (ISBN 9782825117262), p. 137


« Lorsque la dernière bête sauvage aura disparu [...] lorsqu'il ne restera plus un seul espace libre, une seule forêt sauvage, toute la profondeur de l'esprit humain s'évanouira car il n'est pas bon pour l'homme d'être constamment en compagnie de ses semblables et il a épuisé depuis longtemps toute l'utilité qu'il pouvait tirer de la proximité et des communications fréquentes. »

— Constantin Léontiev, L'Européen moyen : idéal et outil de la destruction universelle (1872-1884), trad. Danièle Beaune-Gray, éd. L'Âge d'Homme, coll. « Amers », 1999 (ISBN 9782825112465), p. 58


« [...] ceux qui, semblables à Proudhon et à quelques anarchistes, croient, en dépit de la raison et de la science, en la possibilité d'une société, homogène globale, sans pouvoir, qui devrait clore l'histoire et le développement de l'humanité grâce à son bonheur terrestre. C'est vrai : une telle société même partiellement réalisée, peut, sans en avoir l'intention, mettre fin et même éradiquer physiquement le genre humain ; elle le peut naturellement soir par la multiplication et la folie des inventions, soit par l'ennui et la neurasthénie infus dans un combat contres des obstacles mesquins et inoffensifs qui n'opposent jamais une résistance invincible. Mais une telle société, une fois constituée sous la forme d'un État universel, uniforme et mélangé, ne peut jamais s'arrêter, ne fût-ce que pour un court instant.

Il n'y aura plus personne pour conquérir un voisin affaibli et démocratisé outre mesure ; il n'y aura alors plus de voisin distinct ; on enseignera à chacun, sans aucun doute, à s'auto-détruire tout à fait légalement et avec beaucoup de savoir-faire. »

— Constantin Léontiev, L'Européen moyen : idéal et outil de la destruction universelle (1872-1884), trad. Danièle Beaune-Gray, éd. L'Âge d'Homme, coll. « Amers », 1999 (ISBN 9782825112465), p. 87


« Tous les auteurs que j'ai cités [...] prônent pour les générations futures l'idéal non pas du chevalier, du moine, du militaire, du prêtre, ni même du bon sauvage qui n'a été touché par aucune civilisation [...] ni même une force matérielle qui s'inclinerait devant la force spirituelle — non, leur modèle d'idéal futur leur ressemble : c'est le bourgeois européen moyen ; ni un moujik, ni un seigneur, ni un guerrier, ni un prêtre sacrificateur, ni un Breton, ni un Basque, ni un Tyrolien, ni un Tcherkesse, ni un marquis arborant plumes et velours, ni un trappiste portant son cilice, ni un prélat habillé de brocard ; non, ils sont parfaitement satisfaits de ce type culturel moyen et étriqué auquel ils appartiennent par leur mode de vie et leur situation dans la société, auquel ils souhaitent que le monde entier se conforme définitivement, du haut en bas, pour l'amour d'un sens simpliste de la dignité.

Nous avons vu que ces hommes ne connaissent ni ne comprennent les canons de la beauté, car toujours et partout c'est justement ce type qui est le moins esthétique, le moins expressif, le moins beau en intensité (c'est-à-dire le moins élevé) et en extension (c'est-à-dire le moins large), moins héroïque que les modèles plus compliqués ou plus extrèmes.

[...]

Il serait plus modeste, plus digne et plus intelligent de la part de Proudhon et de ses commensaux de dire haut et fort : "Je suis un érudit et un bourgeois honnête, je suis personnellement satisfait de mon sort, de ma situation moyenne, de mon caractère moyen, mais je ne souhaite en aucun cas, pour le bien de l'humanité, que tous me ressemblent car ce n'est ni esthétique ni civique." »

— Constantin Léontiev, L'Européen moyen : idéal et outil de la destruction universelle (1872-1884), trad. Danièle Beaune-Gray, éd. L'Âge d'Homme, coll. « Amers », 1999 (ISBN 9782825112465), p. 94-96


« Il serait affreux et douloureux de penser que Moïse fit l’ascension du mont Sinaï, que les Hellènes bâtirent l’Acropole, que les Romains entreprirent les guerres Puniques, que le beau et génial Alexandre, coiffé de son casque empenné, franchit le Granique et combattit sous les murs d’Arbelles ; que les apôtres se vouèrent à la prédication, que les martyrs donnèrent leurs souffrances, les poètes leurs chants et les peintres leurs plus belles couleurs, que les chevaliers enfin brillèrent dans les tournois, pour que le bourgeois français, russe ou allemand, vêtu de son costume grotesque, pût se vautrer en fin de compte dans ce bonheur "individuel" ou "collectif" fait de toutes les ruines de la splendeur d’antan !... On rougirait d’être homme, si ce bas idéal de bien-être général, de travail mesquin et de prose ignominieuse, devait triompher pour toujours ! »

— Constantin Léontiev, L'Européen moyen : idéal et outil de la destruction universelle (1872-1884), trad. Danièle Beaune-Gray, éd. L'Âge d'Homme, coll. « Amers », 1999 (ISBN 9782825112465), p. 67-68


« [...] cette indifférence est-elle le bonheur ? Ce n'est pas le bonheur, mais une diminution régulière de tous les sentiments aussi bien tristes que joyeux. »

— Constantin Léontiev, Écrits essentiels, trad. Danièle Beaune-Gray, éd. L'Âge d'Homme, coll. « Slavica », 2003 (ISBN 9782825117262), p. 


« Quand sur les ruines de Rome et de l'Hellade les nouveaux mondes culturels de Bysance et de l'Europe occidentale se sont formés, il est essentiel de noter en premier lieu qu'une nouvelle religion mystique leur avait servi de fondement, en second lieu que cette fondation avait été précédée d'un déplacement de populations — moins important à l'Est pour la fondation de Bysance, plus important à l'Ouest — et en troisième lieu qu'un nouveau centre culturel s'était formé à Bysance sur le Bosphore. Le christianisme est une religion nouvelle pour tous, pour l'Orient comme pour l'Occident. À l'Ouest, le centre est ancien mais renouvelé par un afflux de populations étrangères ; en Orient, la race est ancienne, grecque, beaucoup moins renouvelée par des populations nouvelles, mais en quelque sorte reposée par une longue stagnation des idées et un centre complètement nouveau, Bysance. »

— Constantin Léontiev, L'Européen moyen : idéal et outil de la destruction universelle (1872-1884), trad. Danièle Beaune-Gray, éd. L'Âge d'Homme, coll. « Amers », 1999 (ISBN 9782825112465), p. 63


« En France, les espoirs se consument toujours davantage : la perte de prestige, l'éventualité d'une réaction salvatrice qui s'affaiblit chaque jour, l'irréligion élevée en dogme d'État [...].

Les Barbares ne détruisaient pour ainsi dire que sous le coup de la passion ; les anarchistes d'aujourd'hui justifient ces passions par la raison, la confortent par une théorie, par un système conscient de destruction. Voilà ce qui peut attendre la France maintenant, non seulement de mon point de vue mais aussi d'après celui de beaucoup d'hommes de convictions différentes. »

— Constantin Léontiev, L'Européen moyen : idéal et outil de la destruction universelle (1872-1884), trad. Danièle Beaune-Gray, éd. L'Âge d'Homme, coll. « Amers », 1999 (ISBN 9782825112465), p. 108


« "La Russie est la tête d'un monde en gestation ; la France est la représentante du monde expirant" a dit N. Ia. Danilevksi avec justesse, simplicité et excellence.

La Russie est la tête d'un monde en gestation. La Russie n'est pas seulement un État européen, c'est un monde particulier, intégral. C'est ainsi, et seul un homme qui ne comprend pas l'histoire peut en douter. »

— Constantin Léontiev, L'Européen moyen : idéal et outil de la destruction universelle (1872-1884), trad. Danièle Beaune-Gray, éd. L'Âge d'Homme, coll. « Amers », 1999 (ISBN 9782825112465), p. 111


« Je ne comprends pas les Français. Ils sont capables d'aimer et de servir n'importe quelle France... Je veux pour ma part que ma patrie soit digne de mon estime. Et il faudrait user de contrainte pour m'amener à supporter n'importe quelle Russie. »

— Constantin Léontiev cité par Nicolas Berdiaev, Constantin Leontiev, trad. Hélène Iswolsky, éd. Berg International, coll. « Histoire des idées », 1993 (ISBN 9782900269855), p. 126


« Ils [les Slaves] s’évaporeront comme une simple bulle de savon. Ils s’abîmeront un peu plus tard que les autres races dans le giron de cette bourgeoisie occidentale si haïssable ; ils finiront par être piétinés (et ce sera bien fait) par l’invasion chinoise. »

— Constantin Léontiev cité par Nicolas Berdiaev, Constantin Leontiev, trad. Hélène Iswolsky, éd. Berg International, coll. « Histoire des idées », 1993 (ISBN 9782900269855), p. 151


« La société russe, déjà assez égalitaire par ses habitudes, va être entraînée plus vite que les autres peuples dans le chemin mortel de la confusion générale. Il se peut même (et comme les Juifs qui étaient sûrs de voir naître dans leur sein le maître d’une foi nouvelle), il se peut que nous voyions sortir l’Antéchrist de nos entrailles politiques. Notre politique, d’abord, ne distinguera plus les classes ; ensuite, elle s’affranchira en tout ou en partie du principe ecclésiastique. »

— Constantin Léontiev cité par Nicolas Berdiaev, Constantin Leontiev, trad. Hélène Iswolsky, éd. Berg International, coll. « Histoire des idées », 1993 (ISBN 9782900269855), p. 147


« Notre génie populaire russe, d’essence païenne, a tendance à détruire l’armature chrétienne, à saper les bases du Christianisme. Ce trait nous est surtout sensible dans les manifestations que nous offrent nos sectes mystiques populaires. C’est grâce au Byzantinisme que s’est maintenue l’unité de notre religion. Trois éléments sont réellement forts chez nous : l’Orthodoxie byzantine, l’autocratie héréditaire et illimitée, et probablement la communauté rurale... Notre tsarisme, si fécond et salutaire pour nous, s’est fortifié sous l’influence de l’Orthodoxie, sous celle des idées et de la culture byzantine. Cet apport a consolidé la Russie à demi sauvage et il a fait d’elle un corps véritable... Sachons demeurer fidèles à cette consigne et nous pourrons résister aux assauts de l’Europe internationale, s’il lui venait un jour à l’idée – après avoir détruit tout ce qu’elle possédait de noble – de nous imposer la pourriture et la puanteur de ses lois nouvelles, son bien-être mesquin, et sa médiocrité radicale universelle. »

— Constantin Léontiev cité par Nicolas Berdiaev, Constantin Leontiev, trad. Hélène Iswolsky, éd. Berg International, coll. « Histoire des idées », 1993 (ISBN 9782900269855), p. 


« Aujourd'hui, au XIXe siècle, presque partout dans les États chrétiens, le capitalisme (ou l'accumulation des richesses mobilières) est porté à son comble. Et voilà que presque simultanément à son avènement en Europe, à la fin du XVIIIe siècle et au début du nôtre, apparut sa plus forte antithèse : les premiers élans communistes, le manifeste de Babeuf, etc. et depuis ce temps-là ces mouvements croissent toujours plus et croîtront inévitablement [...].

[...] toute l'histoire du XIXe siècle, éclairée de ce point de vue, a justement consisté à mesure que croissait l'égalité civique, juridique et politique — à augmenter toujours davantage l'inégalité économique, et plus le pauvre de notre temps prend conscience de ses droits civiques, plus il proteste contre la puissance de fait du capital qui n'est justifié par aucune tradition ni aucun principe mystique. Le communisme, dans ses aspirations tumultueuses à un idéal d'égalité immuable, doit, par diverses combinaisons avec d'autres principes, conduire graduellement d'un côté à une moins grande mobilité du capital et de la propriété et de l'autre, à une plus grande inégalité juridique, à de nouveaux privilèges et de nouvelles entraves à la liberté personnelle, à de nouveaux groupes corporatifs contraignants, par des lois nettement délimitées ; vraisemblablement même à des nouvelles formes d'esclavage et d'asservissement personnel [...]. »

— Constantin Léontiev, L'Européen moyen : idéal et outil de la destruction universelle (1872-1884), trad. Danièle Beaune-Gray, éd. L'Âge d'Homme, coll. « Amers », 1999 (ISBN 9782825112465), p. 90-91


« Toutes les idées de progrès sont primaires et grossières, elles sont à la portée de chacun. Tant qu’elles ne furent que l’apanage de quelques esprits d’élite, elles témoignèrent d’intelligence et de profondeur. Des hommes d’un grand savoir les ont ennoblies, grâce à leurs dons exceptionnels. Mais, en elles-mêmes, ces idées-là sont à la fois fausses, grossières et tout à fait repoussantes. Le bonheur terrestre est absurde et impossible ; le règne d’une justice universelle et égale pour tous, est pareillement une absurdité. Il est même une injustice et une insulte à l’égard de l’élite. En sa vérité, l’Évangile n’a pas promis la justice terrestre. Il n’a pas prêché la liberté juridique, mais seulement la liberté de l’esprit, laquelle est accessible même à ceux qui sont enchaînés. Les martyrs au nom de la foi ont existé sous le joug turc. Sous le régime de la Constitution belge, il n’y aura à peine que des bienheureux. »

— Constantin Léontiev cité par Nicolas Berdiaev, Constantin Leontiev, trad. Hélène Iswolsky, éd. Berg International, coll. « Histoire des idées », 1993 (ISBN 9782900269855), p. 


« Ô égalité haïssable ! Ô lâche monotonie ! Ô progrès trois fois maudit ! Ô montagne féconde, nourrie de sang, mais pittoresque, de l’histoire universelle ! Depuis le siècle dernier, te voilà déchirée par une naissance nouvelle, et tes entrailles martyres ont accouché d’une souris. Nous assistons à la venue au monde d’une caricature qui défigure l’image des anciens hommes : l’Européen rationnel moyen, avec son grotesque vêtement, que le miroir de l’art ne saurait même pas idéaliser ; un être à l’esprit mesquin qui se sustente d’illusions, frotté de vertu terrestre et de bonnes intentions pratiques ! Depuis le début de l’histoire, on n’avait point vu d’alliage plus monstrueux : jactance intellectuelle devant Dieu, et platitude morale devant l’idole humanitariste, uniforme et incolore. Humanité exclusivement travailleuse, impie, et dénuée de passions. Peut-on aimer une humanité pareille ? Ne doit-on pas haïr, non pas les hommes eux-mêmes, lesquels sont stupides et ont perdu le sens, mais l’avenir qu’ils se préparent ? Ne devons-nous pas le haïr de toutes les forces de notre âme, et même de notre âme chrétienne ? »

— Constantin Léontiev cité par Nicolas Berdiaev, Constantin Leontiev, trad. Hélène Iswolsky, éd. Berg International, coll. « Histoire des idées », 1993 (ISBN 9782900269855), p. 


« Même au ciel, il n'y a et n'y aura jamais d'égalité. Pas plus dans les récompenses que dans les châtiments. Sur terre, la liberté et l'égalité totale dans les droits n'est pas autre chose qu'une manière de préparer la venue de l'Antéchrist. »

— Constantin Léontiev cité par Nicolas Berdiaev, Constantin Leontiev, trad. Hélène Iswolsky, éd. Berg International, coll. « Histoire des idées », 1993 (ISBN 9782900269855), p. 171


« L'origine de toute sagesse (c'est-à-dire de la vraie foi) se trouve dans la crainte ; l'amour n'en est que la floraison. On ne saurait prendre le fruit pour la racine, et la racine pour le fruit. »

— Constantin Léontiev cité par Nicolas Berdiaev, Constantin Leontiev, trad. Hélène Iswolsky, éd. Berg International, coll. « Histoire des idées », 1993 (ISBN 9782900269855), p. 155


« Ce soi-disant christianisme humanitaire, avec son absurde pardon général, avec son cosmopolitisme sans dogmes définis, avec son enseignement de l'amour sans l'enseignement de la "crainte de Dieu et de la Foi", sans les rites qui symbolisent l'essence même de la vraie doctrine... ce christianisme-là n'est qu'une formule anarchiste, malgré tout le miel qu'il distille... Avec un christianisme de ce genre, on ne peut ni gouverner, ni faire la guerre, et il n'y a pas de raison de prier Dieu... Il ne peut que hâter la Révolution universelle. Il est criminel par sa mansuétude même. »

— Constantin Léontiev cité par Nicolas Berdiaev, Constantin Leontiev, trad. Hélène Iswolsky, éd. Berg International, coll. « Histoire des idées », 1993 (ISBN 9782900269855), p. 157


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