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Citations

« On oublie trop que le monde moderne, sous une autre face, est le monde bourgeois, le monde capitaliste. C’est même un spectacle amusant que de voir comment nos socialistes antichrétiens, particulièrement anticatholiques, insoucieux de la contradiction, encensent le même monde sous le nom de moderne et le flétrissent, le même sous le nom de bourgeois et de capitaliste. »

— Charles Péguy, « De la situation faite au parti intellectuel devant les accidents de la gloire temporelle » (1907), dans Œuvres complètes de Charles Péguy, éd. La Nouvelle Revue française, 1916-1955, t. 3, p. 


« Le monde moderne avilit. Il avilit la cité, il avilit l’homme. Il avilit l’amour ; il avilit la femme. Il avilit la race ; il avilit l’enfant. Il avilit la nation ; il avilit la famille. Il avilit même, il a réussi à avilir ce qu’il y a peut-être de plus difficile à avilir au Monde : il avilit la mort. »

— Charles Péguy, « De la situation faite au parti intellectuel devant les accidents de la gloire temporelle » (1907), dans Œuvres complètes de Charles Péguy, éd. La Nouvelle Revue française, 1916-1955, t. 3, p. 


« [...] en ce monde moderne tout le monde [est] moderne et même ceux qui combattent le moderne et encore plus ceux qui sont investis pour le combattre et qui ne le combattent pas. »

— Charles Péguy cité par Joseph Lotte, « Entretien du samedi 27 septembre 1913, de 5 à 7 heures du soir », dans Lettres et entretiens, éd. L’Artisan du livre, 1927, p. 196


« Tout commence en mystique et finit en politique. Tout commence par la mystique, par une mystique, par sa (propre) mystique et tout finit par de la politique. »

— Charles Péguy, « Notre Jeunesse » (1910), dans Œuvres complètes de Charles Péguy, éd. La Nouvelle Revue française, 1916-1955, t. 4, p. 59


« Comme je l’ai mis tant de fois dans ces cahiers, du temps qu’on ne me lisait pas, le débat n’est pas proprement entre la République et la Monarchie, entre la République et la Royauté, surtout si on les considère comme des formes politiques, comme deux formes politiques, il n’est point seulement, il n’est point exactement entre l’ancien régime et le nouveau régime français, le monde moderne ne s’oppose pas seulement à l’ancien régime français, il s’oppose, il se contrarie à toutes les anciennes cultures ensemble, à tous les anciens régimes ensemble, à toutes les anciennes cités ensemble, à tout ce qui est culture, à tout ce qui est cité. C’est en effet la première fois dans l’histoire du monde que tout un monde vit et prospère, paraît prospérer contre toute culture. »

— Charles Péguy, « Notre Jeunesse » (1910), dans Œuvres complètes de Charles Péguy, éd. La Nouvelle Revue française, 1916-1955, t. 4, p. 47


« Aussitôt après nous commence le monde que nous avons nommé, que nous ne cesserons pas de nommer le monde moderne. Le monde qui fait le malin. Le monde des intelligents, des avancés, de ceux qui savent, de ceux à qui on n’en remontre pas, de ceux à qui on n’en fait pas accroire. Le monde de ceux à qui on n’a plus rien à apprendre. Le monde de ceux qui font le malin. Le monde de ceux qui ne sont pas des dupes, des imbéciles. Comme nous. C’est-à-dire : le monde de ceux qui ne croient à rien, pas même à l’athéisme, qui ne se dévouent, qui ne se sacrifient à rien. Exactement : le monde de ceux qui n’ont pas de mystique. Et qui s’en vantent. »

— Charles Péguy, « Notre Jeunesse » (1910), dans Œuvres complètes de Charles Péguy, éd. La Nouvelle Revue française, 1916-1955, t. 4, p. 46


« ― Heureux ceux qui sont morts pour la terre charnelle,
Mais pourvu que ce fût dans une juste guerre.
Heureux ceux qui sont morts pour quatre coins de terre.
Heureux ceux qui sont morts d’une mort solennelle.

Heureux ceux qui sont morts dans les grandes batailles,
Couchés dessus le sol à la face de Dieu.
Heureux ceux qui sont morts sur un dernier haut lieu,
Parmi tout l’appareil des grandes funérailles.

Heureux ceux qui sont morts pour des cités charnelles.
Car elles sont le corps de la cité de Dieu.
Heureux ceux qui sont morts pour leur âtre et leur feu,
Et les pauvres honneurs des maisons paternelles.

Car elles sont l’image et le commencement
Et le corps et l’essai de la maison de Dieu.
Heureux ceux qui sont morts dans cet embrassement,
Dans l’étreinte d’honneur et le terrestre aveu.

Car cet aveu d’honneur est le commencement
Et le premier essai d’un éternel aveu.
Heureux ceux qui sont morts dans cet écrasement,
Dans l’accomplissement de ce terrestre vœu.

Car ce vœu de la terre est le commencement
Et le premier essai d’une fidélité.
Heureux ceux qui sont morts dans ce couronnement
Et cette obéissance et cette humilité.

Heureux ceux qui sont morts, car ils sont retournés
Dans la première argile et la première terre.
Heureux ceux qui sont morts dans une juste guerre.
Heureux les épis mûrs et les blés moissonnés. »

— Charles Péguy, « Ève » (1913), dans Œuvres complètes de Charles Péguy, éd. La Nouvelle Revue française, 1916-1955, t. 7, p. 162


« [...] c’est une question de savoir si nos fidélités modernes, je veux dire nos fidélités chrétiennes baignant dans le monde moderne, assaillies, battues de tous les vents, battues de tant d’épreuves, et qui viennent de passer intactes par ces deux siècles d’épreuves intellectuelles [...] n’en reçoivent pas une singulière beauté, une beauté non encore obtenue, et une singulière grandeur aux yeux de Dieu. [...] Nos fidélités sont des citadelles. Ces croisades qui transportaient des peuples, [...] qui jetaient des continents les uns sur les autres, [...] elles ont reflué chez nous, elles sont revenues jusque dans nos maisons. [...] Le moindre de nous est littéralement un croisé. [...] nous sommes tous des îlots battus d’une incessante tempête et nos maisons sont toutes des forteresses dans la mer. »

— Charles Péguy, « Un Nouveau théologien » (1911), dans Œuvres complètes de Charles Péguy, éd. La Nouvelle Revue française, 1916-1955, t. 13, p. 101-105


« Il y a quelque chose de pire que d’avoir une mauvaise pensée. C’est d'avoir une pensée toute faite. Il y a quelque chose de pire que d’avoir une mauvaise âme et même de se faire une mauvaise âme. C’est d’avoir une âme toute faite. Il y a quelque chose de pire que d’avoir une âme même perverse. C’est d’avoir une âme habituée. »

— Charles Péguy, « Note conjointe sur M. Descartes et la philosophie cartésienne » (1914, posthume), dans Œuvres complètes de Charles Péguy, éd. La Nouvelle Revue française, 1916-1955, t. 9, p. 96


« En psychologie, en métaphysique nous sacrifions le vrai présent, le présent réel à l’instant de tout à l’heure, à l’être de tout à l’heure, et ainsi nous réduisons le vrai présent, l’être réel à l’état de passé. En morale nous sacrifions aujourd’hui à demain. En économique nous sacrifions toute une race à notre tranquillité de demain.

C’est toujours le système de la retraite. C’est toujours le même système de repos, de tranquillité, de consolidation finale et mortuaire.

Ils ne pensent qu’à leur retraite, c’est-à-dire à cette pension qu’ils toucheront de l’État non plus pour faire, mais pour avoir fait (ici encore ce même virement de temps et de chronologie, cette même descente d’un cran, cette même mise du présent au passé). Leur idéal, s’il est permis de parler ainsi, est un idéal d’État, un idéal d’hôpital d’État, une immense maison finale et mortuaire, sans soucis, sans pensée, sans race.

Un immense asile de vieillards.

Une maison de retraite.

Toute leur vie n’est pour eux qu’un acheminement à cette retraite, une préparation de cette retraite, une justification devant cette retraite. Comme le chrétien se prépare à la mort, le moderne se prépare à cette retraite. Mais c’est pour en jouir, comme ils disent. »

— Charles Péguy, « Note conjointe sur M. Descartes et la philosophie cartésienne » (1914, posthume), dans Œuvres complètes de Charles Péguy, éd. La Nouvelle Revue française, 1916-1955, t. 9, p. 250


« Deux mille ans de labeur ont fait de cette terre
Un réservoir sans fin pour les âges nouveaux. »

— Charles Péguy, « La Tapisserie de Notre-Dame » (1913), dans Œuvres complètes de Charles Péguy, éd. La Nouvelle Revue française, 1916-1955, t. 6, p. 368


« Le dernier des serfs était de la même chrétienté que le roi. Aujourd’hui il n’y a plus aucune cité. »

— Charles Péguy, « Notre Jeunesse » (1910), dans Œuvres complètes de Charles Péguy, éd. La Nouvelle Revue française, 1916-1955, t. 4, p. 210-211


« Le triomphe des démagogies est passager. Mais les ruines sont éternelles. On ne retrouve jamais tout. En pareille matière il est beaucoup plus facile de perdre que de retrouver. »

— Charles Péguy, « Les Suppliants parallèles » (17 décembre 1905), dans Œuvres complètes de Charles Péguy, éd. La Nouvelle Revue française, 1916-1955, t. 2, p. 470


« On ne saura jamais tout ce que la peur de ne pas paraître assez avancé aura fait commettre de lâchetés à nos Français. »

— Charles Péguy, « Notre Patrie » (1905), dans Œuvres complètes de Charles Péguy, éd. La Nouvelle Revue française, 1916-1955, t. 2, p. 322
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Bibliographie

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