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Citations

« La dépendance économique dans laquelle, au sein de la société capitaliste bourgeoise, se trouve la majorité des humains, prive la personne de la liberté et asservit l’esprit. Les droits politiques formels n’y peuvent rien changer. Le principe du libre travail converti en marchandises est un persiflage de la liberté. On a de la peine à défendre sa liberté sous la menace de mourir de faim. »

— Nicolas Berdiaev, De l’esprit bourgeois (1926-1946), trad. Élisabeth Bellençon, éd. Éditions des Syrtes/L’Inventaire, 2021 (ISBN 9782355970481), p. 122-123


« L’homme est séduit par la technique qu’il crée, mais il ne peut se transformer lui-même en machine. Organisateur de la vie, il ne peut dans son for intérieur devenir l’objet de l’organisation, il garde toujours en lui un élément organique, irrationnel et mystérieux. La rationalisation technique et mécanique de la vie et de l’âme humaine suscite inévitablement une réaction. »

— Nicolas Berdiaev, De l’esprit bourgeois (1926-1946), trad. Élisabeth Bellençon, éd. Éditions des Syrtes/L’Inventaire, 2021 (ISBN 9782355970481), p. 71


« La technique a cessé d’être neutre. Le problème technique est pour nous un problème spirituel, celui du destin de l’homme et de son rapport avec Dieu. »

— Nicolas Berdiaev, De l’esprit bourgeois (1926-1946), trad. Élisabeth Bellençon, éd. Éditions des Syrtes/L’Inventaire, 2021 (ISBN 9782355970481), p. 66


« C’est à Babylone que, pour la première fois dans l’Histoire, parut la civilisation bourgeoise, dominant l’Orient entier. »

— Nicolas Berdiaev, De l’esprit bourgeois (1926-1946), trad. Élisabeth Bellençon, éd. Éditions des Syrtes/L’Inventaire, 2021 (ISBN 9782355970481), p. 37


« Les Russes ignorent le scepticisme raffiné des Français, ils sont croyants, même s’ils professent un communisme matérialiste et ceux qui non seulement n’ont plus la foi mais persécutent l’Église orthodoxe, gardent dans le fond du cœur l’empreinte de l’orthodoxie. »

— Nicolas Berdiaev, L’Idée russe (1946), trad. Hélène Arjakovsky, éd. Mame, 1970, p. 259


« On assiste également à une poussée de nationalisme en l’Union Soviétique et un retour aux traditions du passé. Le léninisme-stalinisme n’est déjà plus le marxisme classique. Le communisme russe est une déformation de l’idée messianique russe. Il proclame que la lumière venue d’Orient illuminera les ténèbres de l’Occident bourgeois. [...] Le communisme est un phénomène russe malgré l’idéologie marxiste. Le communisme est le destin de la Russie, il représente un moment dans le destin intérieur de son peuple. »

— Nicolas Berdiaev, L’Idée russe (1946), trad. Hélène Arjakovsky, éd. Mame, 1970, p. 257


« L’idée de “Moscou-Troisième Rome”, comme celle de “Moscou-Troisième Internationale”, sont un reflet du messianisme russe mais un reflet déformé. »

— Nicolas Berdiaev, L’Idée russe (1946), trad. Hélène Arjakovsky, éd. Mame, 1970, p. 224


« Le peuple russe est le peuple de la fin et non du milieu du processus historique. »

— Nicolas Berdiaev, L’Idée russe (1946), trad. Hélène Arjakovsky, éd. Mame, 1970, p. 138


« La Russie est un immense Occident-Orient, c’est tout un monde grandiose. Le peuple russe détient de grandes forces. C’est le peuple de l’avenir, il résoudra les problèmes que l’Occident n’est plus en mesure de résoudre, qu’il ne sait plus poser dans toute leur profondeur. »

— Nicolas Berdiaev, L’Idée russe (1946), trad. Hélène Arjakovsky, éd. Mame, 1970, p. 77


« C’est également au nom de la personne que Herzen s’élèvera contre l’esprit petit-bourgeois occidental. Il vit en Europe l’affaiblissement et, en fin de compte, la mort de l’individualité. Le chevalier du Moyen Âge a été remplacé par le boutiquier. Aussi est-ce dans le moujik russe, dans le touloupe gris, qu’il cherchera le salut contre l’embourgeoisement général. Ce moujik russe a beau être esclave, il a plus de personnalité que le bourgeois européen. »

— Nicolas Berdiaev, L’Idée russe (1946), trad. Hélène Arjakovsky, éd. Mame, 1970, p. 68


« [...] dans le marxisme communiste se découvriront des traits du messianisme russe. »

— Nicolas Berdiaev, L’Idée russe (1946), trad. Hélène Arjakovsky, éd. Mame, 1970, p. 66-67


« [...] le Russe a plus d’aptitude à la vie communautaire que l’occidental et moins de propension à l’individualisme [...]. »

— Nicolas Berdiaev, L’Idée russe (1946), trad. Hélène Arjakovsky, éd. Mame, 1970, p. 56


« La mission de la Russie était de garder et de protéger le christianisme véritable : l’orthodoxie. C’est une vocation religieuse. Les Russes se définissent par leur “orthodoxie”. La Russie est le seul royaume orthodoxe et, dans ce sens, un royaume universel, à l’image de la Première et Deuxième Rome. [...] Les tsars de Moscou se considéraient comme les héritiers des empereurs de Byzance, ils faisaient remonter leur filiation royale à César-Auguste. »

— Nicolas Berdiaev, L’Idée russe (1946), trad. Hélène Arjakovsky, éd. Mame, 1970, p. 17


« [...] jamais la Russie n’a été bourgeoise. »

— Nicolas Berdiaev, L’Idée russe (1946), trad. Hélène Arjakovsky, éd. Mame, 1970, p. 11


« Le caractère complexe et contradictoire ; de l’âme russe peut être relié au fait que deux courants mondiaux s’y heurtent et s’y conjuguent : l’Orient et l’Occident ; le Russe n’est ni un pur Européen ni un pur Asiatique. La Russie, c’est tout un continent, un énorme Occidento-Orient, elle relie deux mondes. Et dans l’âme russe, depuis toujours, se sont affrontés ces deux éléments : l’occidental et l’oriental. »

— Nicolas Berdiaev, L’Idée russe (1946), trad. Hélène Arjakovsky, éd. Mame, 1970, p. 10


« Il est de la plus haute importance que les chrétiens commencent par se convertir eux-mêmes, c’est-à-dire deviennent des croyants réels et non formels. Ceux qui haïssent et crucifient ne peuvent revendiquer la dénomination de chrétiens, quels que soient les signes extérieurs auxquels ils se livrent. »

— Nicolas Berdiaev, Le Christianisme et l’antisémitisme (1938), trad. Princesse Théodore, éd. Édition de l’Académie religieuse et philosophique russe,, p. 27


« Mysérieuse est la destinée historique des Juifs ! Inconcevable et inexplicable rationnellement est la préservation même de ce peuple ! Du point de vue des conjectures historiques habituelles, il aurait dû depuis longtemps cesser d’exister. Aucun peuple du monde n’aurait survécu au sort qui lui est échu. [...] Nulle autre nation n’aurait résisté à une dissémination d’aussi longue durée, sans finir par se dissoudre et disparaître. »

— Nicolas Berdiaev, Le Christianisme et l’antisémitisme (1938), trad. Princesse Théodore, éd. Édition de l’Académie religieuse et philosophique russe,, p. 4-5


« Le communisme a été un reproche lancé au monde chrétien, une sentence portée contre sa longue carence dans l’accomplissement de ses devoirs essentiels. »

— Nicolas Berdiaev, Les Sources et le sens du communisme russe (1936), trad. Lucienne Julien Cain, éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue française », 1966, p. 345


« L’idée d’une société sans classes, basée sur le travail, dans laquelle chacun travaille pour les autres et pour tous en vue d’un but élevé, n’implique pas la négation de Dieu ; elle serait au contraire plus conforme au christianisme que celle sur laquelle est fondée la société capitaliste bourgeoise. »

— Nicolas Berdiaev, Les Sources et le sens du communisme russe (1936), trad. Lucienne Julien Cain, éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue française », 1966, p. 307


« Le communisme contient en soi dans sa conception de la vie un élément juste et sain, conforme du reste à la conception chrétienne, un élément qui veut que chaque homme serve, par sa vie, un but supérieur, et non son propre intérêt. »

— Nicolas Berdiaev, Les Sources et le sens du communisme russe (1936), trad. Lucienne Julien Cain, éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue française », 1966, p. 305


« [...] au lieu de la Troisième Rome, la Russie va réaliser la Troisième Internationale [...]. Car ce que Marx ni les marxistes d’Occident n’auraient pu prévoir est arrivé : c’est-à-dire l’identification des deux messianismes, le messianisme du prolétariat et le messianisme du peuple russe. [...] Cette conscience messianique, ouvrière et prolétarienne se comporte vis-à-vis de l’Occident presque de la même manière que se comportaient les slavophiles. Occident pour lui se confond presque avec bourgeoisie et capitalisme. »

— Nicolas Berdiaev, Les Sources et le sens du communisme russe (1936), trad. Lucienne Julien Cain, éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue française », 1966, p. 286-287


« Ce sera le communisme rouge qui réalisera le vieux rêve des slavophiles, de transporter la capitale de Pétersbourg à Moscou, au sein du Kremlin. Ce sera lui qui reprendra la formule des slavophiles et de Dostoïevski : Ex Oriente lux. De Moscou, du Kremlin, jaillit la lueur qui doit éclairer les ténèbres bourgeoises de l’Occident. Et en même temps le communisme crée un État despotique et bureaucratique appelé à régner non pas seulement sur les corps, mais aussi sur les âmes, conformément aux traditions d’Ivan le Terrible et de l’autocratie des Tsars. Le marxisme remanié et refondu des Russes proclame le primat du politique sur l’économique, la force qu’a le pouvoir de modifier à son gré la vie économique du pays. »

— Nicolas Berdiaev, Les Sources et le sens du communisme russe (1936), trad. Lucienne Julien Cain, éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue française », 1966, p. 281-282


« Aucun écrivain russe n’a pu consentir à ce que la Russie suive le chemin tracé par l’Occident, le chemin bourgeois, rationaliste, libéral et humanitaire. »

— Nicolas Berdiaev, Les Sources et le sens du communisme russe (1936), trad. Lucienne Julien Cain, éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue française », 1966, p. 173


« [...] l’actualisme technique détruit l’éternité et entrave de plus en plus l’élan humain vers elle. L’homme manque de temps pour l’éternité. »

— Nicolas Berdiaev, L’Homme et la Machine (1933), trad. J.P. et H.M., éd. R&N Éditions, 2019 (ISBN 9791096562145), p. 48


« Il est pour ainsi dire impossible de conserver dans notre monde moderne une forme de religion déterminée par des influences héréditaires, nationales, familiales et sociales. La vie religieuse devient plus personnelle [...]. »

— Nicolas Berdiaev, L’Homme et la Machine (1933), trad. J.P. et H.M., éd. R&N Éditions, 2019 (ISBN 9791096562145), p. 47


« La machine et la technique portent atteinte à la vie psychique de l’homme et surtout à sa vie émotionnelle et sentimentale. L’élément psycho-émotionnel est refoulé dans la civilisation contemporaine. Si l’on peut dire que l’ancienne culture mettait en péril le corps humain qu’elle négligeait, harassait et laissait s’étioler, il semble que la civilisation mécano-technique soit avant tout fatale à l’âme. »

— Nicolas Berdiaev, L’Homme et la Machine (1933), trad. J.P. et H.M., éd. R&N Éditions, 2019 (ISBN 9791096562145), p. 42


« [...] cette nouvelle forme d’existence que présente la vie des masses organisées, cette technisation, détruit la beauté de l’ancienne culture, l’individualisation, l’originalité ; tout y devient uniformément collectif, toutes choses sont fabriquées sur un gabarit unique perdant ainsi l’empreinte de la personnalité. C’est l’ère de la production en série, de la production anonyme. Et non seulement le côté extérieur et plastique de la vie se trouve dépourvu d’individualité, mais la vie intérieure et émotionnelle subit le même sort. »

— Nicolas Berdiaev, L’Homme et la Machine (1933), trad. J.P. et H.M., éd. R&N Éditions, 2019 (ISBN 9791096562145), p. 38-39


« [...] c’est la première foi que l’homme devint seigneur et maître de la terre, voire même de l’univers entier. Dès lors son attitude à l’égard du temps et de l’espace se transforme radicalement. De peur d’être écrasé par eux, l’homme se blottissait jadis contre sa mère — la terre ; mais il ne craint plus de s’en éloigner maintenant qu’il commence à dominer ces éléments. Si le fait qu’il peut se passer de la sollicitude et de la production maternelles témoigne de sa maturité, il signifie aussi, pour lui, une lutte plus rude à soutenir, — contrepartie des bienfaits prodigués par la technique. Car la machine présente toujours deux traits divergents : d’une part elle assure les commodités et le confort, d’autre part elle exige une austérité et une témérité. »

— Nicolas Berdiaev, L’Homme et la Machine (1933), trad. J.P. et H.M., éd. R&N Éditions, 2019 (ISBN 9791096562145), p. 37


« Pour le grec antique et l’homme du Moyen âge il existait un cosmos immuable, un système hiérarchique, un “ordo” éternel ; il existait pour Aristote comme pour saint Thomas d’Aquin. La notion même de l’ordre immuable de la nature était liée au principe de la téléologie objective. Et voici que la technique, sous la forme où elle triomphe dès la fin du XVIIIe siècle, détruit la foi en cet ordre éternel, et cela, d’une manière infiniment plus brutale et plus profonde que l’évolutionnisme. »

— Nicolas Berdiaev, L’Homme et la Machine (1933), trad. J.P. et H.M., éd. R&N Éditions, 2019 (ISBN 9791096562145), p. 25-26


« [...] la seule foi que l’homme de la civilisation moderne conserve est celle dont il entoure la technique, sa puissance et son progrès infini. »

— Nicolas Berdiaev, L’Homme et la Machine (1933), trad. J.P. et H.M., éd. R&N Éditions, 2019 (ISBN 9791096562145), p. 17


« Dieu châtie les hommes et les peuples par les révolutions. »

— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 85


« La démocratie reste indifférente au bien et au mal. »

— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 114


« L’entreprise de l’histoire moderne n’a pas réussi, elle n’a pas glorifié l’homme comme elle le voulait le glorifier. Les promesses de l’humanisme ne se sont pas réalisées. L’homme est infiniment las et prêt à s’en remettre à toutes sortes de collectivités dans lesquelles l’individualité humaine disparaît définitivement. L’homme ne peut pas supporter sa déréliction, sa solitude. »

— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 17-18


« Le catholicisme n’a pas seulement conduit l’homme au ciel, il a créé la beauté et la gloire ici-bas également. En cela est le sublime mystère du catholicisme : son aspiration au ciel et à la vie éternelle créé la beauté et fonde la puissance dans la vie terrestre temporaire. L’ascétisme du monde catholique médiéval a été une bonne préparation pour la création, il a conservé et concentré les forces créatrices de l’homme. L’ascèse médiévale a été une école sublime pour l’homme, elle a donné une trempe spirituelle sublime. Et l’homme européen de l’histoire moderne a vécu de ce qu’il avait spirituellement acquis à cette école, il est redevable de tout au christianisme. »

— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 24


« Mais au XIXe siècle s’est produite en Europe une des plus terribles révolutions qu’ait jamais subies l’humanité dans toute son histoire. La machine est entrée en vainqueur dans la vie humaine et a altéré tout son rythme organique. La machine a détruit toute la structure séculaire de la vie humaine, structure qui était organiquement liée à la vie de la nature. »

— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 33


« Il faut à présent sauver la liberté de l’esprit humain. Devant les peuples chrétiens se dresse à nouveau la question de savoir s’ils prennent au sérieux leur christianisme et s’ils veulent tendre leur volonté vers sa réalisation. Si les peuples chrétiens n’opèrent pas la tension la plus extrême de l'esprit pour réaliser la voie chrétienne, s’ils ne manifestent pas l’activité la plus extrême, alors c’est le communisme athée qui triomphera dans le monde. L’esprit libre doit, lui, agir indépendamment du fait de savoir quelles forces prédominent et triomphent. Le christianisme revient à l’état d’avant Constantin et doit à nouveau conquérir le monde. »

— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 110-111


« La fausse idolâtrie devant l’État et la nation doit être vaincue religieusement. »

— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 109


« Toute révolution est un malheur. Il n’y a jamais eu de révolutions heureuses. [...] toute révolution est [...] ignoble. Il n’y a jamais eu et il ne peut y avoir de révolutions qui soient bonnes, harmonieuses, belle. Toute révolution est un échec. »

— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 83


« La femme est plus liée avec l’âme du monde, avec les forces élémentaires premières, et c’est par la femme que l’homme communie avec elles. La culture masculine est trop rationaliste, elle s’est trop éloignée des mystères immédiats de la vie cosmique et elle y revient à travers la femme. Les femmes jouent un grand rôle dans le réveil religieux de notre temps. »

— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 80


« Il est spirituellement faux de considérer que la source du mal soit en dehors de moi, que je sois moi-même le réceptacle du bien. Un fanatisme haineux et méchant naît sur un tel terrain. Accuser de tous les maux les juifs, les francs-maçons, l’intelligentsia, est une perversion aussi grande que d’accuser de tous les maux la bourgeoisie, la noblesse, l’ancien pouvoir. Non, la source du mal est aussi en moi-même et je dois donc en assumer la faute et la responsabilité. »

— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 86


« Quand tout est ressenti comme périmé et épuisé, quand le terrain s’ameublit, comme cela se passe à notre époque, quand il n’y a déjà plus d’espoirs et d’illusions, quand tout est démythifié et démasqué, alors le terrain est prêt pour un mouvement religieux dans le monde. Il en a toujours été ainsi. »

— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 133


« On ne peut pas lutter contre le socialisme avec des idées “bourgeoises” et on ne peut pas lui opposer la société bourgeoise-démocratique et capitaliste des XIXe et XXe siècles. C’est la société bourgeoise qui a engendré le socialisme et qui y a conduit. »

— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 124


« Le socialisme n’est ni une utopie ni un rêve, le socialisme est une menace et un avertissement réels pour les peuples chrétiens, c’est un sévère rappel qui leur est fait de ce qu’ils n’ont pas exécuté les préceptes du Christ, de ce qu’ils se sont détournés du christianisme. »

— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 125


« Dans l’humanisme il y eut trahison de ce qui était le plus sacré et à cause de cette trahison l’homme paye par son histoire, il subit déception après déception. Aujourd’hui commence le processus de barbarisation de la culture européenne. Après la décadence raffinée, c’est l’invasion de la barbarie qui doit se produire sur les sommets de la culture européenne. Sous ce rapport, la guerre mondiale aura une signification fatidique pour le destin de l’Europe. L’Europe cultivée et humaniste s’est mise à nu et a perdu toute défense contre l’invasion de la barbarie extérieure et intérieure. On pouvait entendre depuis longtemps déjà les bruits sourds de la barbarie souterraine. Mais la société bourgeoise européenne décadente n’a rien fait pour sauver les vieilles et éternelles valeurs sacrées de l’Europe, elle a vécu avec insouciance, en comptant sur une prospérité infinie. »

— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 43


« Le surhomme se substitue chez Nietzsche au Dieu perdu. Il ne peut pas et ne veut pas se maintenir dans l’humain, dans l’uniquement humain. Dans l’individualisme surhumain de Nietzsche l’image de l’homme périt. De la même façon périt l’image de l’homme dans le collectivisme surhumain de Marx. Marx est spirituellement sorti de la religion humaniste de Feuerbach. Chez lui aussi, mais de façon différente, l’humanisme passe à son contraire, il se dénature en antihumanisme. Marx sent l’individualité humaine comme l’apanage du vieux monde bourgeois, il exige son dépassement dans le collectivisme. La morale de Marx ne reconnaît pas la valeur de la personne humaine, lui aussi rompt avec l’esprit d’humanité, lui aussi prêche la dureté envers l’homme au nom de la collectivité, au nom du Zukunftstaat socialiste à venir. La collectivité se substitue chez Marx au Dieu perdu. »

— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 31


« L’homme sans Dieu cesse d’être homme : en cela est le sens religieux de la dialectique intérieure de l’histoire moderne, de l’histoire de l’épanouissement et de la mort des illusions humanistes. »

— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 41


« Mais aucun tourbillon, aucun déchaînement chaotique d’instincts n’a la force d’éteindre la lumière de la révélation chrétienne de Dieu, de l’homme, et du Dieu-Homme. Les portes de l’enfer ne la vaincront pas. C’est pourquoi la source de la lumière restera, quelque fortes que puissent être les ténèbres qui l’étreignent. Et nous devons nous sentir non seulement les derniers Romains, fidèles à la Vérité et à la beauté anciennes et éternelles, mais aussi tournés vers le jour créateur invisible à venir, quand se lèvera le soleil de la nouvelle Renaissance chrétienne. Peut-être aura-t-elle lieu dans les catacombes et s’accomplira-t-elle pour quelques-uns seulement, peut-être n’aura-t-elle lieu qu’à la fin des temps. Il ne nous est pas donné de le savoir. Mais nous savons de façon sûre que la lumière éternelle et la beauté éternelle ne peuvent être détruites par quelque ténèbre et quelque chaos que ce soit. La victoire de la quantité sur la qualité, de ce monde limité sur l’autre monde infini est toujours fantomatique. C’est pourquoi c’est sans crainte et sans abattement que nous devons sortir du jour de l’histoire moderne pour entrer dans la nuit du Moyen Âge. Que s’obscurcisse la lumière trompeuse et mensongère ! »

— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 46


« Il est impossible de libérer l’homme au nom de la liberté de l’homme, l’homme lui-même ne peut-être le but de l’homme, l’homme lui-même ne peut être le but de l’homme. Ainsi nous appuyons-nous sur un vide absolu. L’homme privé de tout contenu, il n’a pas de lieu où remonter. La liberté de l’homme s’avère être une liberté tout à fait formelle et vide de sens. »

— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 61


« La civilisation individualiste du XIXe siècle, avec sa démocratie, avec son matérialisme, avec sa technologie, avec son opinion publique, sa presse, sa bourse et son parlement a contribué à l’affaiblissement et à la chute de la personne, à la défleuraison de l’individualité, au nivellement et à la confusion universelle. La personne était plus forte et plus vive à l’époque médiévale. L’individualisme a favorisé les processus d’égalitarisme qui effacent toutes différences d’individualités. »

— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 61


« Mais les formes de nationalisme auxquelles sont arrivés les peuples aux XIXe et XXe siècles et qui ont engendré la guerre mondiale, signifient la désagrégation de l’humanité, la séparation de toute unité spirituelle, le retour après le monothéisme chrétien au polythéisme païen. Les nationalismes français, allemand, anglais et italien de notre temps sont tout à fait païens, profondément antichrétiens et antireligieux. Le nationalisme français de la Troisième République est pour une part importante le produit de l’athéisme. La foi dans le Dieu Vivant s’est éteinte et l’on a commencé à croire en un faux dieu, en la nation, comme idole, de même que d’autres ont commencé à croire en la plus pernicieuse des idoles, à l’internationalisme. »

— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 68


« Il serait possible d’établir deux structures, deux types d’âmes, l’un étant disposé à accueillir l’esprit de Tolstoï, l’autre, celui de Dostoïevski. »

— Nicolas Berdiaev, L’Esprit de Dostoïevski (1923), trad. Alexis Nerville, éd. Stock, 1974, p. 273


« Le sens du conservatisme consiste non pas à faire obstacle au progrès et à l’élévation, mais à s’opposer à la régression et à la descente vers la nuit du chaos [...]. »

— Nicolas Berdiaev, De l’inégalité (1923), trad. Anne et Constantin Andronikof, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 2008 (ISBN 9782825138601), p. 98


« [...] la destruction de tout hiérarchisme est aussi celle de la personne, car celle-ci est liée à celui-là. Seule la hiérarchie permet des individualités de qualités diverses. »

— Nicolas Berdiaev, De l’inégalité (1923), trad. Anne et Constantin Andronikof, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 2008 (ISBN 9782825138601), p. 28


« L’idée aristocratique exige la domination réelle des meilleurs ; la démocratie, la domination formelle de tous. [...] Tout ordre vital est hiérarchique, il a son aristocratie. Seul un amas de décombres n’est pas hiérarchisé et aucune qualité aristocratique ne s’en dégage. »

— Nicolas Berdiaev, De l’inégalité (1923), trad. Anne et Constantin Andronikof, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 2008 (ISBN 9782825138601), p. 103-105


« Les expériences d’un paradis sur la terre ont toujours abouti à un enfer [...]. »

— Nicolas Berdiaev, De l’inégalité (1923), trad. Anne et Constantin Andronikof, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 2008 (ISBN 9782825138601), p. 30


« Votre unité abstraite et négative de l’humanité anéantit tous les degrés hiérarchiques de celle-ci pour en faire une abstraction. Or, dans l’unité concrète de tous, il ne peut y avoir de contradiction entre la nation et l’humanité. Toutes les nations s’y affirment et y atteignent leur puissance et leur épanouissement. Dans votre unité abstraite de l’humanité, en revanche, l’être des nations est supprimé ; il n’y a pas plus d’humanité dans et par les nations qu’il n’y a de nation dans et par l’humanité. Celle-ci devient une abstraction de tous les niveaux de l’être individuel concret. Dans l’universalité, la nation et l’humanité sont indissolublement membres de la hiérarchie cosmique où l’une suppose l’autre. Dans l’internationalisme, elles s’excluent mutuellement pour disparaître toutes deux en fin de compte. La notion abstraite de l’homme ou d’une classe vient remplacer la réalité et une humanité abstraite, détachée de tout ce qui est organique, vivant et individuel, est substituée à l’humanité concrète. L’internationalisme est opposé non seulement au nationalisme, mais encore à l’universalité, à l’unité positive de tous ; il est mû par l’esprit du néant, qui détruit le réel en imaginant des fantômes. »

— Nicolas Berdiaev, De l’inégalité (1923), trad. Anne et Constantin Andronikof, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 2008 (ISBN 9782825138601), p. 79


« Le socialisme est bourgeois jusque dans sa profondeur et il ne s’élève jamais au-dessus du sentiment ni des idéaux bourgeois de l’existence. Il veut seulement que l’esprit bourgeois soit étendu à tous, qu’il devienne universel et fixé dans les siècles des siècles [...] »

— Nicolas Berdiaev, De l’inégalité (1923), trad. Anne et Constantin Andronikof, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 2008 (ISBN 9782825138601), p. 150


« L’histoire n’est pas encore terminée. Son dynamisme ne faiblit point, il se renforce. Le monde ne se rapproche pas de la prospérité ici-bas, du paradis sur terre, de l’idylle de la paix éternelle. Tout nous force à penser que le monde va vers un conflit terrible, vers des heurts toujours recommencés des forces historiques, vers de nouvelles épreuves de la virilité de l’esprit, de sa trempe chevaleresque. La surface de la planète n’est pas encore organisée. Bien des problèmes historiques attendent leur solution. Il est impossible de résoudre pacifiquement la question de l’Orient. Et vous, vous voudriez rendre les peuples intérieurement impuissants à la veille d’une lutte sans merci, alors que les forces de leur esprit vont être soumises à de terribles épreuves. La négation démocratique et socialiste de la guerre est un désarmement très astucieux des peuples chrétiens et des vieilles armées, afin de former la nouvelle armées internationale du royaume terrestre. L’esprit socialiste de l’internationalisme supplante l’esprit chrétien d’universalité. Le christianisme désire lui aussi la paix dans le monde entier et la fraternité des peuples. Il veut néanmoins que ce soit une paix authentique, intérieure, et une fraternité véritable. Dans son monde et au sein de sa fraternité véritable, le mal sera vaincu. Dans les vôtres, le mal reste à jamais invaincu. Votre pacifisme est une négation du mal, la volonté de l’ignorer et de s’en accommoder comme s’il n’existait pas. Aussi n’atteindrez-vous jamais ni la fraternité mondiale ni la paix éternelle. Et votre pacifisme détruit définitivement les principes chevaleresques, ceux de la lutte active et virile contre le mal. »

— Nicolas Berdiaev, De l’inégalité (1923), trad. Anne et Constantin Andronikof, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 2008 (ISBN 9782825138601), p. 195


Le « socialisme est une révolte de la matière contre l’esprit. »

— Nicolas Berdiaev, De l’inégalité (1923), trad. Anne et Constantin Andronikof, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 2008 (ISBN 9782825138601), p. 167


« L’inégalité est une condition du développement de la culture. »

— Nicolas Berdiaev, De l’inégalité (1923), trad. Anne et Constantin Andronikof, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 2008 (ISBN 9782825138601), p. 163


« Il est monstrueusement injuste et cruel d’exiger des conditions égales pour tous les hommes. »

— Nicolas Berdiaev, De l’inégalité (1923), trad. Anne et Constantin Andronikof, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 2008 (ISBN 9782825138601), p. 169


« Une démocratie pure, abstraite et autocrate, est la tyrannie la plus terrible ; elle tue l’homme. Le pouvoir illimité de tous est plus effrayant que le pouvoir despotique d’un seul. »

— Nicolas Berdiaev, De l’inégalité (1923), trad. Anne et Constantin Andronikof, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 2008 (ISBN 9782825138601), p. 142


« La démocratie est hostile à la manifestation de personnalités fortes, brillantes et créatrices. Elle crée un milieu social qui tend à tout niveler, à s’emparer de la personne humaine pour se la soumettre. Votre opinion publique démocratique est la plus terrible des tyrannies, elle opprime l’esprit de l’homme, elle lui coupe les ailes. »

— Nicolas Berdiaev, De l’inégalité (1923), trad. Anne et Constantin Andronikof, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 2008 (ISBN 9782825138601), p. 143


« Ne vous laissez pas tromper par les apparences, ne cédez pas à des illusions trop indigentes. Depuis la création du monde, c’est toujours la minorité qui a gouverné, qui gouverne et qui gouvernera. Cela est vrai pour toutes les formes et tous les genres de gouvernement, pour la monarchie et pour la démocratie, pour les époques réactionnaires et pour les révolutionnaires. On ne saurait échapper au gouvernement de la minorité, et vos efforts démocratiques pour créer le règne de la majorité représentant en fait une pauvre autosuggestion. [...] En réalité, il n’y a que deux types de pouvoir : l’aristocratie et l’ochlocratie, le gouvernement des meilleurs ou celui des pires. »

— Nicolas Berdiaev, De l’inégalité (1923), trad. Anne et Constantin Andronikof, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 2008 (ISBN 9782825138601), p. 104-105


« Les moyens démocratiques ne permettent ni l’édification des "science et des arts", ni la création d’une philosophie et d’une poésie, ni l’avènement de prophètes et d’apôtres. Couper la culture de ses sources aristocratiques, c’est les tarir toutes. Il ne reste alors plus, par l’esprit, qu’à vivre sur le capital mort du passé, tout en le niant et en le haïssant. Cependant, les sources elles-mêmes de la culture du passé commencent de plus en plus à se perdre et la rupture du passé commencent de plus en plus à se perdre et la rupture va s’approfondissant. Toute la culture européenne de haut style est liée à la tradition antique. L’antiquité gréco-romaine représente la vraie culture et il n’en existe aucune autre en Europe. »

— Nicolas Berdiaev, De l’inégalité (1923), trad. Anne et Constantin Andronikof, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 2008 (ISBN 9782825138601), p. 217


« Le terme libéralisme a depuis longtemps perdu tout son charme, quoiqu’il provienne de l’admirable mot : liberté. Celle-ci n’est pas quelque chose qui inspire les masses. Elles n’y font pas confiance, elles sont incapables d’y rattacher leurs intérêts immédiats. En vérité, il y a dans la liberté quelque chose d’aristocratique plutôt que de démocratique. C’est une valeur plus précieuse pour la minorité que pour la majorité, car elle s’adresse avant tout à la personne, à l’individualité. Le libéralisme n’a jamais triomphé dans les révolutions, ni dans les sociales, ni dans les politiques parce que dans toutes révolution ce sont les masses qui se soulèvent. Or elles sont toujours mues par la passion de l’égalité, non par celle de la liberté. C’est le principe de l’égalité et non celui de la liberté qui met en branle les grandes révolutions. L’esprit libéral, par nature, n’est pas révolutionnaire. Le libéralisme est un sentiment et une conception du monde propres à la couche cultivé de la société. Il n’y a pas en lui d’éléments tumultueux, de feu, qui embrase le cœur. Il contient de la mesure et trop de forme. La vérité du libéralisme est formelle. Elle ne dit rien de positif ni de négatif quant au contenu de la vie, elle voudrait en garantir un à la personne, quel qu’il soit. L’idée libérale n’est pas capable de prendre l’apparence d’une religion et ne suscite pas à son propre égard des sentiments de cet ordre. C’est là sa faiblesse mais aussi son aspect positif. »

— Nicolas Berdiaev, De l’inégalité (1923), trad. Anne et Constantin Andronikof, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 2008 (ISBN 9782825138601), p. 119
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Bibliographie

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